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BDSM dans l'Art du Temps (3): La mort de J.G. Ballard, romancier de Science-fiction, auteur de « Crash ».

 

J.G.Ballard 1930-2009 AURORAWEBLOG.

J.G. Ballard - 15 novembre 1930 - 19 avril 2009.  Photo © AFP.

 
 
La mort de l’écrivain James Graham Ballard, annoncée il y a trois heures à peine, me « cueille » au beau milieu de cette « série » BDSM sur « L’Art du Temps ».
Comment pourtant ne pas lui rendre hommage ici ?
Et le faire vite -sur le coup- avant que demain les journaux n’aient tout dit bien mieux que moi.
 
La Science-fiction n’est pas ma tasse de thé.
J’ai pourtant tout lu de trois auteurs seulement : Bradbury, K. Dick et Ballard.
Je n’inclus pas William Burroughs pour ne faire hurler aucun puriste même si, parfois, bien que n’étant pas labellisé « SF », certaines de ses obsessions littéraires aient été proches justement de la démarche de K. Dick ou de celle de Ballard.
 
Alors qu’écrire sur Ballard qui explique sa présence sur mon blog en cette nuit, à l’heure de l’adieu ?
Aucune accointance visible à première vue avec le BDSM, certes, mais une exploration minutieuse et glacée par cet amoureux du Surréalisme des névroses violentes du monde contemporain et la descente dans les enfers des entrailles des « machines » ou des mécanismes et engrenages sociaux auxquels nous allons parfois jusqu’à livrer une passion immodérée et morbide.
L’analyse au scalpel de cette passion.
De la part d'un écrivain du chaos.
 
Si Bataille et bien d'autres, si Murakami (Ryû) en ces dernières années, sont des écrivains de l’Eros et du Thanatos, Ballard l’était aussi.
Puisqu’il s’intéressait à la psychanalyse, il serait assez (trop) facile de faire remonter cela à son incarcération à douze ans dans les camps chinois de la seconde guerre mondiale qu’il devait raconter en 1982 dans son « Empire du soleil » porté un peu plus tard à l'écran par Spielberg.
 
Son roman le plus lu, « Crash », fit scandale dès sa parution en 1974.
L’adaptation qu’en donna David Cronenberg (mais j’ai toujours pensé que Lynch aurait pu tout aussi bien la faire) au cinéma en 1996 relança l’opprobre.
 
Nonobstant son sujet  excessivement tabou (une sarabande désespérée, à la fois masochiste et sadique autour du fantasme des corps brisés, conduite par un groupe halluciné d’accidentés de la route érotiquement fascinés par les collisions au point de remettre en scène sous la houlette d’un « maître à penser » les plus célèbres d’entre elles afin d'admirer la symétrie entre cicatrices et froissement des tôles), « Crash » demeure tout de même la grande mise en cause de notre vision inconsciente de l’automobile comme glorification de la « puissance sexuelle ».
 
Au sujet de « Crash », Ballard déclara :
« Je m'intéresse à ce qui touche au plus profond de la psychologie humaine, ce besoin concomitant de sécurité et de violence extrême.
On vit par exemple dans un monde où l'automobile est reine, alors qu'elle fait un million de morts chaque année.
Ça me passionne d'essayer de comprendre pourquoi les hommes sont fascinés et pervertis par les machines. »
 
Il m’est arrivé de me demander, lorsque des gouvernements ont cru bon de « montrer » -afin de lutter contre la vitesse- des spots publicitaires très « hard » à des heures de forte présence devant l’écran télévisuel, s’ils ne faisaient pas plus de mal que de bien.
 
Il ne m’est pas arrivé en revanche de me demander si Ballard avait eu ou non raison d’écrire « Crash », ce dernier pour sulfureux qu'il soit portant en lui -comme toutes les œuvres de Ballard- son antidote.
De plus c’est un roman difficile, accessible aux seuls lecteurs avertis, et ce d’autant plus que si le nom de son auteur est relativement célèbre, ce dernier vendit en fait bien peu d’exemplaires de ses nombreux livres.
 
 
« J'ai rêvé d'autres accidents susceptibles d'augmenter ce catalogue de déchirures. J' y intégrais un plus grand nombre d'éléments provenant de la construction automobile. Je les reliais à la technologie toujours plus complexe de l'avenir. […] Tout en étreignant Gabrielle, j’imaginais, ainsi que Vaughan me l'avait enseigné, les accidents qui pourraient impliquer les grands de ce monde. Je me représentais les blessures qui se prêteraient à l'élaboration de fantasmes érotiques, les coïts surprenants qui glorifieraient le contenu sexuel d'une technologie encore impensable. » 
 
James Graham Ballard - « Crash » - 1974 - Folio - Gallimard.
 
 
 
PS : Avant que la mort ne fasse de cet écrivain mal connu une icône pour  « bobos » à court de « déviances » , vous pouvez découvrir aussi de lui d’autres romans plus « consensuels » : par exemple « La forêt de cristal » des débuts de sa carrière ou le caustique et dénonciateur « Super Cannes » (oui, le Cannes de la Côte d’Azur…) de 2001, ou encore « Millenium people » de 2005 (qui représente -en ces temps sociaux troublés- un véritable miroir d’ alerte qui nous est tendu) et, bien sûr, l’ « Empire du soleil »…
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
AURORA | 4/20/2009
Aurora, c'est grâce à vous que j'apprends ce matin la mort de JG Ballard, dont (comme tout le monde) je ne connaissais que "Crash". Ce que vous écrivez me donne envie de compléter ma lecture de cet écrivain ; le reste de son oeuvre semble aussi passionnant , effectivement.
Idalie Felix | 4/20/2009
Et voilà.
Chr-Borhen | 4/20/2009
Très bel article, apprécié par le fan de SF que je suis.
serge | 4/20/2009
je découvre comme souvent ici
j'aime "les machines", les grandes pinces qui pressent les déchets métalliques...
jeanne | 4/20/2009
Sur la Science-Fiction, je me suis arrêté à la lecture imposée (mais appréciée) par ma célèbre professeur de Français Madame Avy, "Les Chroniiques martiennes" de Ray Bradbury, que j'ai fait suivre par "Fahrenheit 451. J'ai ensuite de mon plein gré beaucoup aimé "Ravages" de René Barjavel. On trouve une chronique consacrée à l'actualité de la SF dans le "Journal du Dimanche" tous les mois, je crois.
Joel Faure | 4/20/2009
J'apprends cette mauvaise nouvelle ici même à l'instant.
Ballard était un grand mais pas le plus facile c'est sûr.
Il osait des thèmes gonflés comme dans "I.G.H." que je me permets d'ajouter à ta liste de lectures conseillées.

Quant à "La Science-fiction n’est pas ma tasse de thé. " je ferais juste cette remarque : la littérature de SF c'est avant tout de la littérature.
SF ou pas, la bonne littérature transcende les genres et les étiquettes.
Et le plus mauvais roman de Ballard ou de Dick vaut bien plus que tous les Marc Levy...
(phrase idéale pour se faire des copains !)
Gilles | 4/20/2009
Gilles> Je suis bien d’accord. Il est difficile de parler de « genre » en littérature.
En nommant Barjavel, Joël me rappelle que je l’ai lu mais sans le classer dans la SF pour ses autres livres qui n’en étaient pas. De même que Robert Merle n’est pas pour moi un auteur de « romans historiques » seulement.
La bonne littérature quel que soit son « genre » reste de la bonne littérature.
Pour la SF, j’aurais dû écrire seulement qu’à part les auteurs que j’ai cités et dont j’ai lu l’ensemble de l’œuvre, je ne vais pas d’emblée vers le rayon SF dans une librairie.
Je crois surtout à des rencontres coup de foudre avec des écrivains.
Si j’ai pris plaisir à « Des fleurs pour Algernon », je n’ai cependant pas cherché à savoir si Keyes avait écrit d’autres livres.
Je n’ai jamais dépassé la dixième page d’un van Vogt, ni celle d’un Herbert.
Peut-être un problème de traduction qui me les rendaient « lourds » ?
J’ai lu un seul tome du « Monde de Gor » de John Norman. Au tiers du second, j’ai cru que des pustules allaient me pousser et j’ai préféré « sauver ma peau » au sens propre.
Je ne veux donc pas me faire passer pour la spécialiste que je ne suis pas.
Par contre, qui lit Bradbury finit par entendre parler de K.Dick et une fois entré dans l’univers de celui-ci (grandiose auteur), il ne le quitte plus.
J’en ai tant et tant parlé autour de moi qu’un jour, on m’a dit que si j’aimais K.Dick et Burroughs, alors je devais lire Ballard.
Ce fut un autre coup de foudre. Il ne s’achève pas aujourd’hui parce que reste un livre à paraître et puis tous les autres à relire…
Cela dit, il y a des univers qu’on qualifie de « genres » et qui me rebutent définitivement.
J’ai un mal extrême avec la « fantasy » dont mon fils est friand. Je ne peux absolument pas lire les livres qu’il aime.
Et le polar ésotérique (style « da Vinci Code ») me fait dormir en moins de dix minutes, moi qui suis pourtant devenue insomniaque depuis quelques années…


AURORA | 4/20/2009
PS: J'oubliais mes expériences Marc Levy et Guillaume Musso dans la série "Horresco referens"...
Moi aussi, je vais me faire des amis!
AURORA | 4/20/2009
La SF est un 'genre' à mon goût. Lorsque j'ai découvert une mine Barjavel dans un coin obscur de la bibliothàque paternelle, je l'ai creusée et dévorée de A à Z. Cependant je crois ignorer l'auteur auquel tu rends les honneurs.
Comme vous (GIlles et toi) je ne connais pas d'autre moteur d'exploration littéraire que le hasard, qu'il sagisse de hasard de curiosité, de plaisir ou tout autre, Cela reste bien une affaire de rencontre, au dessus des commodes classifications.
Hélas, celle ci, si elle devait se produire pour moi, ne profitera qu'aux héritiers des droits d'auteurs.
Et comme nous parlons bouquins, j'ai offert à mon fils ainé un truc dont tu avais semble t il rendu compte, écrit par la plumitive Agnés Giard "Dictionnaire de l'Erotisme Japonais": Mon fils me l'a prêté pour compléter mon éducation : Il est manifeste que cet ouvrage s'est engouffré dans une niche vacante, c'est trés bien; il est non moins clair que l'auteur n'a rien, ou peu , compris des complexes moeurs japonaises des 18 et 19 siècles, et n'en retient que le sensationnalisme pour le vulgariser; c'est moins bien.
Tout ce qui brille n'est pas or... mais parfois on ne peut pas manquer d'y penser quant à cet auteur,
troll | 4/21/2009
Marc Levy ? Mais ce n'est pas de la littérature ! Même pas de la soupe industrielle pré-digérée, ce serait offensant pour Liebig et Knorr !
Idalie Felix | 4/21/2009
Mon frère, de 11 ans mon ainé, avait dans sa chambre des armoires et cartons pleins de bouquins de SF que j'ai lu en grandissant. De A comme Asimov à Z comme Zelazny, mes livres de chevet étaient de John Brunner, Arthur C. Clarke, Philip José Farmer, Robert A. Heinlein, Stanislas Lem, Frederik Pohl, Clifford D. Simak, Norman Spinrad, Theodore Sturgeon, Pierre Suragne(alias Pelot), Jack Vance, Joan D. Vinge... sans parler de ceux que tu cites.
Puis W.Gibson et le mouvement cyber-punk, et puis et puis et puis... Bref la SF je suis tombé dedans quand j'étais petit !

"Je n’ai jamais dépassé la dixième page d’un van Vogt, ni celle d’un Herbert."
Alors là je dis "hou !" que Marden aille vite chercher son martinet ! ;)

Van Vogt n'est pas un grand styliste mais quelle imagination ! J'ai devoré ses romans pendant mon adolescence. J'ai adoré "A la poursuite des Slans" en particulier et il a pas mal influencé K.Dick entre autres, K.Dick qui reste le plus grand pour moi.

Herbert, je comprends qu'il soit moins facile d'y entrer, mais la richesse de ses univers vaut aussi souvent le coup.

- Keyes : il n'a pas écrit grand chose d'autre que « Des fleurs pour Algernon » à ma connaissance.

- Bradbury et Barjavel sont en général ceux que connaissent les "non initiés" SF ;)
Et pourquoi pas ? Ils sont plutôt bons.

- Burroughs... bien déjanté, intéressant même si illisible souvent !
Faut prendre quel truc pour tout comprendre ? ;)

- John Norman : le mot littérature est un peu grand pour lui. Et j'imagine bien tout ce qui doit te donner des allergies !

- Guillaume Musso : je n'ai jamais lu, les couvertures et les titres à la Marc Levy me suffisent !

- la fantasy...encore une étiquette qu'on colle parfois sur des choses fort différentes.
J'aime Neil Gaiman et Terry Pratchett pour leur humour, par exemple.
Mais une grande partie de la production "Fantasy" me tombe des mains, même Tolkien...

- Ballard : je viens de tomber sur cet article : http://www.lesinrocks.com/actualite/actu-article/article/lecrivain-de-science-fiction-jg-ballard-est-mort/
Gilles | 4/21/2009
Gilles> Superbe témoignage sur ta découverte de ces auteurs. Je t’ai lu avec un plaisir fou.
Peut-être devrais-tu rouvrir enfin ton blog….
Mais pour la petite histoire, Marden qui aime pourtant la SF n’a pas pu lire Van Vogt du tout lui non plus.
Le martinet ne pourra donc être sorti sous ce prétexte !!!


PS: Et merci au nom de toutes/tous pour le lien avec "Les Inrocks".
AURORA | 4/21/2009
Troll> Il est tout à fait vrai qu'Agnès Giard est surtout "spécialiste" du Japon actuel et que, d'autre part, elle joue sur la veine du sensationnalisme dans ses livres comme sur son blog.
J'ai mis du temps à comprendre ce hiatus mais c'est fait maintenant.
Elle a en cela ses raisons privées (voir ma note http://auroraweblog.karmaos.com/post/1819) d'une part et le passé de sa "carrière" (entre autres, reporter au Japon pour la revue en ligne de Demonia [encore et toujours]) jusqu'à ce que Libération la choisisse comme blogueuse "d'Eros" officielle).
AURORA | 4/21/2009
- erratum : "que j'ai luS"
- Sinon reprendre mon blog ?... P'tet ben que oui, p'tet ben que non !
Mais c'est sur ça m'éviterait de tant squatter tes comm ;)
Gilles | 4/22/2009
Gilles> J'adore que tu squattes mes comm's: tu es ma "valeur ajoutée"!
Mais rouvrir ton blog ne t'empêcherait pas de rester Mon "Monsieur Plus" tant aimé...
En tout cas, si tu le fais, complète immédiatement avec l'url ta page d'utilisateur de KarmaOS...
AURORA | 4/22/2009
j'ai bien aimé Ballard dans les années 80 où j'ai lu certaines de ses oeuvres
fleurdatlas | 4/29/2009
KarmaOS